L’inflation est un thème central cette année et pas uniquement pour les investisseurs. Elle est omniprésente, on en voit ses effets en effectuant le plein à la pompe, en faisant ses courses ou en payant ses factures d’énergie. On estime qu’actuellement en Belgique elle dépasse 10%. Cela veut donc dire que sur un an, si l’on observe le panier de consommation standard d’un belge (nourriture, essence, assurances, abonnements téléphoniques, matériels informatiques, etc.), ce dernier lui coute 10% plus cher. Il faut remonter aux années 1970 et aux chocs pétroliers pour trouver des augmentations de prix aussi fortes. Sur une période de plus de 60 ans en Belgique, la moyenne de l’inflation se situe autour de 3,4% (i). Cela démontre à quel point la situation à laquelle nous sommes confrontés ces jours-ci est assez exceptionnelle. 

L’effet de l’inflation sur le long terme.

En termes d’investissement, l’inflation est sans doute l’ennemi public numéro 1. Lorsque l’on prend la décision d’épargner, c’est-à-dire de reporter sa consommation actuelle dans le futur, la moindre des choses est que cette épargne « batte » l’inflation future. Si l’augmentation spectaculaire de l’inflation que l’on observe pour le moment permet d’appréhender son impact nocif sur le pouvoir d’achat, on a parfois tendance à l’oublier quand celle-ci est plus faible. Pourtant, sur des longues périodes, son impact est colossal. En 1976, un paquet de frites coutait 0,5 (ii) alors qu’au début de cette année 2022, le même paquet valait €3 (iii). Son prix a donc fait fois six en un peu plus de 45 ans. Et cela n’a rien d’exceptionnel. En 1980, un demi de bière coutait environ €0,4 (iv) alors qu’il revient à €4 aujourd’hui (v). Dès lors, un épargnant belge qui a mis €0,9 de côté aux alentours de 1980 doit détenir environ €7 aujourd’hui pour pouvoir s’acheter son paquet de frites et sa bière sinon son pouvoir d’achat se voit réduit.

 

Quel est l’impact sur mes placements ? 

Au cours d’une année chahutée comme 2022, il semble légitime de douter qu’investir dans des actions et des obligations puisse être la solution pour maintenir voire idéalement augmenter son pouvoir d’achat. En effet, beaucoup d’indices actions ont perdu 20% ou plus depuis le début de l’année et du côté obligataire ça n’est guère plus réjouissant. De ce fait, un portefeuille standard composé d’actions et obligations enregistre des performances négatives conséquentes, alors même que l’inflation fait des ravages. Le fait d’avoir été investi durant cette année aggrave en quelque sorte la situation. 

Il est toutefois essentiel de garder à l’esprit que l’on récolte le fruit d’un portefeuille d’investissement sur le long terme. Cette année boursière est mauvaise mais comme d’autres l’ont déjà été. Pourtant, au bout d’un certain temps, un portefeuille se redresse systématiquement pour retrouver son cap haussier. On pourrait résumer cela par l’adage « après la pluie vient le beau temps ». C’est d’ailleurs ce que confirme la recherche académique.  

Que dit la recherche académique ? 

Une étude (vi) sur le sujet est particulièrement éclairante. Wei Dai et Mamdouh Medhat ont analysé les rendements de plus de 20 actifs différents (obligations et actions) sur 2 périodes distinctes, une très longue s’étendant de 1927 à 2020 (94 ans) et une plus courte et plus récente s’étalant de 1991 à 2020 (30 ans). Leur constat est implacable : la grande majorité des classes d’actifs offrent un rendement supérieur à l’inflation, et ce même durant des périodes d’inflation élevée. Cela veut donc dire que par le passé, les actions et les obligations ont généré un rendement suffisant pour préserver et même augmenter le pouvoir d’achat des investisseurs, et ce en dépit des fluctuations assez fortes que l’on peut parfois subir. A l’inverse, garder son argent sur un compte courant n’offrira aucune protection contre l’inflation étant donné son rendement anecdotique voire inexistant. 

Et en pratique ? 

Ces résultats sont confirmés si l’on simule l’évolution de €0,9 investi en 1980 dans un portefeuille 100% actions ou dans un portefeuille plus classique composé à 50% d’actions et 50% d’obligations. Dans le cas d’un portefeuille 100% actions, notre investisseur disposerait en septembre 2022 de €34,2. Pour un portefeuille 50/50, son investissement aurait généré €14,5. Dans ce dernier cas, ce montant lui permettrait désormais de s’acheter 2 paquets de frites et 2 demis (qu’il partagerait avec un ami) et de laisser un pourboire de €0,5 au frittier.  

Si l’on revient sur l’étude académique susmentionnée, les auteurs précisent qu’il n’y a pratiquement pas de corrélation à travers le temps entre les performances des actifs et l’inflation. Autrement dit, une inflation élevée n’induit pas forcément des rendements faibles voire négatifs. C’est précisément pour cette raison qu’il convient de rester investi et de ne pas dévier de la stratégie initialement fixée. 

En Conclusion ? 

La conclusion s’impose : en dépit des difficultés à court terme, le meilleur moyen de se protéger contre l’inflation est de rester investi. 

Sources:
i: https://databank.worldbank.org/
ii : http://www.agripressworld.com/_STUDIOEMMA_UPLOADS/downloads/5809fr.pdf
iii : https://www.tcma-conseil.com/leconomie-expliquee-avec-de-la-biere-en-40-ans-le-prix-du-demi-a-quasiment-double/
iv : https://bx1.be/categories/news/le-prix-du-paquet-de-frites-en-hausse-a-bruxelles/
v : https://www.combien-coute.net/biere-locale/belgique/
vi : “US Inflation and Global Asset Returns” par Wei Dai et Mamdouh Medhat, Juillet 2021
vii: Détails sur la simulation :
• La partie action est représentée par l’indice MSCI World.
• La partie obligation est représentée par l’indice FTSE European World Government Bond (hedgé en EUR). Cette indice n’existe que depuis 1985. La performance du portefeuille obligataire entre 1980 et 1985 est assimilée à 0.
• Réallocation du portefeuille tous les mois.
• 1% de frais ont été pris en compte.